Bien planté sur ses jambes écartées, les poings aux hanches, Raymond Besnard leva les yeux pour jeter un regard vers le derrick qui, à l’extrémité de la plate-forme, dressait sa fine pyramide métallique. L’arbre de la sonde tournait rond. Enduit de graisse, il actionnait inlassablement le trépan qui s’enfonçait dans le sol sous-marin à quelque deux mille mètres de profondeur. Quand donc enverrait-il vers la surface des boues imprégnées d’hydrocarbures annonçant la découverte d’un gisement de pétrole ?
Le problème n’intéressait Besnard que sur un plan purement technique, tout comme il intriguait les autres membres du personnel affecté à « Cassiopée ». Chaque jour, ils épiaient la tête de l’ingénieur et du géologue qui analysaient les échantillons remontant dans les tubes car cette attente, à la longue, devenait crispante.
Ramenant les yeux vers l’étendue marine, Besnard essaya de se faire une idée de la prochaine évolution du temps. Le ciel était plombé, la brise modérée, la houle, du nord au sud, assez molle. A vue de nez, pas de grand changement à prévoir dans les douze heures à venir.
Mieux valait, pourtant, s’en assurer. Serré dans la salopette brun vert qui moulait son torse puissant, Besnard fit demi-tour et, tout en se dirigeant vers le « château », il grogna quelques conseils à des hommes qui amarraient des tubes de réserve amenés une heure plus tôt par le bateau ravitailleur.
Il ouvrit la porte d’acier de la station-radio, demanda à l’opérateur :
- Que raconte la météo ?
Davron, habitué à ces manières abruptes, récita sans tirer sa cigarette de sa bouche :
- Vents du nord-ouest, force 3 à 4. Visibilité moyenne, mer calme. Mais ça ne durera pas... Une dépression est en train de se creuser sur le centre de la France, et elle va probablement nous amener du gros temps dès demain matin.
- Si ce n’est que demain, ça m’est égal, rétorqua Besnard. Du moment qu’on peut procéder à l’inspection de routine...
- Vous n’avez rien à craindre. Au pire, la tempête ne se lèvera que vers la fin de la nuit.
- Bon. A part ça, comment va votre fiston ?
Davron s’assombrit, désigna de la tête un feuillet de papier posé sur sa table, à côté du procès verbal d’écoute :
- Le ravitailleur m’a apporté une lettre de ma femme. Avant-hier, le médecin refusait de se prononcer. Alors, n’y tenant plus, j’ai téléphoné... Le gamin est hors de danger, paraît-il, mais on ne sait pas encore si cette attaque de polio laissera une paralysie importante dans la jambe droite. Un beau petit gars de huit ans, vous vous rendez compte ?
Besnard, arborant un faciès tourmenté, grommela :
- Cré bon Dieu... C’est pas de chance. Il n’était pas vacciné, votre môme ?
- Non, mais ce n’était pas notre faute. Quand on a voulu le faire, il y a trois mois, il avait de l’albumine dans les urines.
Besnard hocha la tête.
- Enfin, s’il est sauvé, c’est l’essentiel. Les séquelles, de nos jours, ça se répare. On est outillé pour.
- Tout dépend du degré de la paralysie, objecta Davron, pessimiste. Je me souviens qu’à la télé...
Il s’interrompit, haussa les épaules, puis reprit :
- Vous avez raison, après tout : il vit. Je ne devrais songer à rien d’autre. Mais ici, sur cette île artificielle, on se défend mal contre les soucis. Ce que j’ai pu broyer du noir, ces derniers jours !
- Tenez bon ; pour vous, ce sera bientôt la relève. A ce soir.
Besnard s’en alla prévenir les plongeurs. Au loin, à quatre ou cinq milles, un chalutier traînait ses filets. Un espagnol, probablement.
- Ça marche, dit Besnard aux quatre hommes qui jouaient aux cartes au bar-cantine, à l’étage inférieur. Désolé de troubler la partie, mais il faut vous équiper.
Les interpellés, des gaillards athlétiques dont l’âge oscillait entre 25 et 30 ans, jetèrent sans trop de regret leur jeu sur le tapis.
- On y va, émit l’un d’eux en se levant.
- Je vous attendrai près de la grue bâbord, spécifia Besnard.
Avant de remonter sur le deck, il s’en fut rendre une courte visite à Fabre, le chef-mécanicien. Ce dernier lisait un roman policier. En pull-over à col roulé, carré dans un fauteuil confortable, il rabaissa son livre. Besnard lui annonça :
- Nous pourrions avoir un coup de tabac demain à l’aube. Je crois qu’il serait prudent de rehausser la plate-forme à partir de minuit.
- De combien ?
- On peut s’attendre à des creux de huit à dix mètres.
La coque se trouvant, déjà, à cinq mètres au-dessus du niveau des flots, il fallait donc doubler son élévation pour la soustraire à l’impact des vagues. C’était l’affaire d’un quart d’heure.
- D’accord, opina Fabre. Je mobiliserai l’équipe pour minuit tapant.
- Les plongeurs vont descendre dans quelques minutes. Rien de particulier à leur demander ?
Fabre réfléchit, les yeux plissés.
- Non, répondit-il. Les contrôles de stabilité ne révèlent aucune défectuosité. Que vos gars s’attachent surtout à la recherche des traces de corrosion.
- D’une semaine à l’autre, il n’y a pas de danger qu’elles se multiplient beaucoup.
- Méfiez-vous. La rouille est notre principal adversaire, et particulièrement au sabot des piliers, aux endroits où le sable du fond racle le métal. C’est là que ça souffre le plus.
- Ils ouvriront l’œil, promit Besnard. Voulez-vous appeler un grutier ?
- Tout de suite.
De son pas lourd qui faisait vibrer les tôles, Besnard regagna le pont puis, les deux mains appuyées sur le bastingage, il regarda vers la côte. Distante d’une quinzaine de kilomètres, elle apparaissait comme un mince ruban de sable. Hossegor, la localité la plus proche, située au nord-est, n’était pas visible, même par temps très clair.
Quelques minutes plus tard, les plongeurs débouchèrent du château.
Vêtus de leur combinaison de caoutchouc luisant, le masque relevé sur le front, ils tenaient leurs palmes sous le bras et divers outils dans les mains. Le grutier attachait une nacelle au crochet du câble. Besnard vint vers eux.
- Examinez bien les points d’appui, recommanda-t-il. Fabre insiste là-dessus.
Les intéressés acquiescèrent tout en achevant de se préparer. Alourdis par leurs bouteilles d’oxygène, marchant comme des canards à cause de leurs palmes, ils prirent successivement place dans la nacelle.
Les lampes frontales dont ils étaient munis ne devant pas entrer trop brutalement en contact avec l’eau, ils furent d’abord soulevés, puis amenés en douceur près de la surface. L’un après l’autre, ils s’immergèrent, le quatrième s’en allant inspecter à la nage les parties émergées des piliers.
Ces piliers triangulaires avaient une dizaine de mètres de côté. Des entretoises plus grosses que le bras reliaient leurs trois arêtes et conféraient à chacun des supports de la plate-forme une solidité à toute épreuve. L’énorme tripode constitué par ces supports atteignait 55 mètres de haut, à partir du fond de la mer, et il soutenait la charge d’environ 4 500 tonnes que représentait le ponton de forage avec ses machines, ses aménagements, son minuscule héliport et son derrick.
Sous l’eau, chacun des plongeurs entama méthodiquement, lampe allumée, l’examen du pilier qui lui était assigné. Peu à peu, ils descendirent ainsi vers le fond, tournant en spirale autour des pylônes afin de dépister les défauts que pouvaient receler poutrelles et jointures. Des vents soufflant parfois à 150 km à l’heure et des vagues d’une force dévastatrice imposaient à l’ensemble de la construction des contraintes terribles : il suffisait d’une faille quelque part pour compromettre la sécurité de la monstrueuses machine et des hommes qui vivaient à son bord.
L’inspection se révéla satisfaisante. Même les sabots (des cylindres creux taillés en biseau qui, servant de base aux piliers, s’enfonçaient dans le sol sablonneux) étaient intacts, comme neufs.
Édifiés, les plongeurs remontèrent en respectant les paliers de décompression. Ils retrouvèrent dans la nacelle leur compagnon qui avait vérifié les parties hautes des colonnes de soutien ; la grue les ramena sur le pont tandis qu’ils se débarrassaient de leur masque respiratoire.
- Alors ? s’enquit Besnard. Rien de spécial ?
Tous firent des signes de dénégation. L’un d’eux marmonna :
- C’est pas demain que ça bougera... La tour Eiffel est dix fois plus fragile que nos béquilles !
- Tant mieux, rétorqua le contremaître. Paraît qu’on va être secoué la nuit prochaine... Merci, les gars.
Il retourna à la station de radio et son regard accrocha de nouveau le chalutier, plus proche à présent, et qui tirait toujours avec obstination ses filets engloutis. « Il ne ferait pas mal de rentrer son chalut et de se tailler vers un port, celui-là... », songea Besnard. « Il devrait pourtant savoir qu’une tempête dans le golfe de Gascogne n’est jamais une rigolade. »
Davron était encore de quart.
- Vous pouvez informer la compagnie que l’inspection hebdomadaire a eu lieu et que tout est normal, dit Besnard. Accessoirement, signalez qu’à quatre heures de l’après-midi, le forage avait atteint la profondeur de 2 135 mètres.
L’opérateur alluma illico son émetteur de phonie pendant que Besnard, tirant de la poche de sa salopette un paquet de gauloises, s’offrait une cigarette avant d’aller s’exposer au grand air du large.
A minuit, comme prévu, Fabre procéda à la manœuvre d’élévation. Simultanément, les moteurs qu’on appelait « les locomotives » actionnèrent en grondant de formidables engrenages. Ces derniers, embrayés sur les crémaillères des piliers, soulevèrent lentement la plateforme, et le vacarme réveilla tous les hommes au repos.
Comme hissée par des crics, elle grimpa vers le sommet de ses trois robustes pattes afin de se soustraire au déchaînement des flots.
Lorsqu’elle surplomba ceux-ci à la hauteur voulue, les moteurs s’arrêtèrent. Un grand silence se creusa. Et puis, les bruits habituels du bord renaquirent ; à part les servants du derrick, les mécaniciens et le radio de service, tout le monde se rendormit.
Ce fut vers cinq heures et demie du matin que le vent s’accrut de façon notable.
Une heure plus tard, Besnard résolut de se lever. La complainte rageuse de la bise dans les superstructures l’énervait. De temps à autre, un coup de bélier ébranlait les piliers et le choc se répercutait dans toute la plate-forme.
Bien que l’île artificielle fût stable comme un roc, Besnard ressentait à chaque tempête l’obscure méfiance des terriens égarés sur l’océan. Il se demandait sans arrêt si certains matériels ne devraient pas être arrimés plus solidement qu’ils ne l’étaient.
Parvenu sur le pont, il constata que le maître d’équipage s’était montré prévoyant : des filins tendus d’un bout à l’autre du deck permettaient de circuler sur celui-ci en s’agrippant à eux, de sorte que les risques d’être précipité à la mer par une rafale étaient considérablement réduits.
Des flocons d’écume s’effilochaient sur la crête des vagues. Grises, avec des reflets glauques, celles-ci déferlaient en rangs serrés vers la côte, avant-garde moutonnière d’une houle plus ample et plus redoutable qui se gonflait au large des Cornouailles.
La côte avait disparu. Sur tout l’horizon, un ciel dans lequel se déplaçaient rapidement de gros nuages noirs coiffait l’étendue liquide. Aucun bâtiment ne se profilait sur cette mer hargneuse qui charriait des odeurs d’algues.
Les bras des grues, abaissés à l’horizontale et maintenus par des câbles, ne craignaient rien. Des cales de bois, de part et d’autre du tas de tubes de réserve déjà proprement ficelé, l’empêcheraient de glisser sur les tôles du pont. Quant au derrick, il pouvait résister aux plus violentes tornades.
Les feux de position brûlaient encore, quoique le jour fût levé, mais Besnard ne jugea pas cette précaution superflue. Il alla jeter un coup d’œil à l’autre bout de la plate-forme, afin de voir si des outils ne traînaient pas. Lorsqu’il fit face au vent, il eut presque le souffle coupé et dut baisser la tête pour reprendre sa respiration.
Non, il n’avait pas de raison de s’inquiéter : Cassiopée était prête à affronter l’ouragan, si tant est que la tempête atteindrait cette intensité.
Besnard reflua donc vers la cantine, espérant qu’un steward serait là pour lui servir un bol de café.
En fait, il n’était pas le premier amateur : Davron, Fabre et un autre mécanicien, assis près d’une des fenêtres, bavardaient en attendant leur petit déjeuner. Il les rejoignit et s’affala sur un siège.
- Mieux vaut rester chez soi, plaisanta-t-il. A moins qu’il y ait des cocus parmi nous... Pour eux, ce serait le moment de sortir.
- Besnard, vous avez des idées fixes, remarqua Fabre. On devrait vous mettre à l’amende chaque fois que vous parlez de cocus, c’est-à-dire plusieurs fois par jour. Votre subconscient serait-il obsédé par cette éventualité ?
Besnard tourna vers lui une face ébahie.
- Moi ? fit-il. Du diable si je pense à ça... Pour nous autres pétroliers, la vie deviendrait impossible.
- Il n’y a pas que les pétroliers et les marins... Tout le monde peut devenir cocu, affirma sérieusement le second mécanicien. Moi, je connais un gars qui est ébéniste ; il travaille chez lui du matin au soir. Eh bien, ça n’empêche pas que...
- On est bien parti, de grand matin, railla
l’opérateur de radio. Alors, est-ce qu'il vient, ce jus ?
Un choc sourd, venu des profondeurs. fit trembler les cloisons. Les quatre hommes se regardèrent, médusés. Jamais la plate-forme n’avait encaissé un paquet de mer d'une telle impétuosité.
Et soudain, le plancher de la cantine s’inclina. Tous ses occupants s'accrochèrent instinctivement à la table, sans réfléchir. Mais l’inclinaison s’accéléra et une horrible angoisse s’empara d’eux. Ils dégringolèrent pêle-mêle contre la paroi opposée alors que la plate-forme tout entière penchait de plus en plus.
Lorsque le ponton frappa la surface, il y eut une explosion fantastique accompagnée d’un immense geyser. Le derrick fendit à son tour les vagues tandis que l’eau s’engouffrait de toutes parts dans les cales et dans les aménagements. Poursuivant sa chute, le colossal engin privé d’un de ses points d’appui bascula dans un énorme bouillonnement et sombra inexorablement jusqu’au fond.
Là où s’élevait encore Cassiopée quelques instants plus tôt, la mer refermée, déserte, s’abandonnait comme ailleurs au souffle de la tempête.
Sur l’écran d’un radar de Bayonne, un point lumineux venait de s’effacer.
La sonnerie du téléphone retentit à sept heures du matin au poste de la Gendarmerie Maritime.
- Ici, la station côtière, annonça le correspondant d’une voix soucieuse. Il doit se passer du vilain du côté de la plate-forme de forage et j'ai l’impression que vous devriez intervenir rapidement.
- Ah oui ? Pourquoi ? s’enquit le brigadier Loussac sans se départir de son calme.
- Je crains qu’une catastrophe ne se soit produite. Ne recevant plus d’écho, le technicien du radar du port m’a demandé d’établir une liaison. Or, depuis dix minutes que je l’appelle, la station de Cassiopée ne répond plus, ni en graphie ni en phonie. Et par ce temps-là...
- Comment ? glapit Loussac. Plus d’écho ?
- Non... Ne perdez pas de temps : il y a peut-être des types qui se débattent dans la flotte en ce moment même !
- Je fais le nécessaire, assura sobrement le brigadier.
Dans la seconde qui suivit, il alerta son supérieur, le capitaine Potier. Celui-ci, jugeant qu’il faisait trop mauvais pour qu’un hélicoptère puisse prendre l’air, donna immédiatement des ordres pour l’appareillage de la vedette de sauvetage.
Peu après, cette embarcation cingla vers la position qu’occupait auparavant le ponton.
Par vent debout et mer forte, il lui fallut près d’une heure pour arriver sur les lieux, mais la conviction des gendarmes était acquise depuis belle lurette : Cassiopée s’était écroulée dans la mer.
Atterrés, ils explorèrent une vaste superficie afin de retrouver des survivants. Mais, à part une large flaque de mazout et les quelques débris flottants que laisse toujours un naufrage, ils n’aperçurent pas de radeaux ni de corps soutenus par un gilet de liège.
Tout en patrouillant dans la région du sinistre, la vedette envoya un message aux autorités maritimes, à la fois pour signaler officiellement la disparition de la plate-forme et pour demander quelles dispositions devaient être prises.
On répondit que l’emplacement du naufrage devait être balisé d’urgence, pour la sécurité de la navigation dans ces parages, et que si tout espoir de repêcher des rescapés pouvait être raisonnablement abandonné, la vedette pouvait rallier le port de Bayonne. De toute manière, rien de valable ne pourrait être entrepris tant que les éléments seraient déchaînés.
Le bateau de la gendarmerie poursuivit cependant ses recherches. Ballotté par les lames. il finit par découvrir un cadavre encore vêtu d’un ciré jaune. Ce noyé, à en juger par sa mise, avait dû se trouver sur le pont au moment du désastre. Quant aux autres membres du personnel, surpris par la soudaineté de l’accident, ils devaient être prisonniers de la carcasse d’acier qui gisait à présent sur le fond.
Ce sondage offshore (1) avait coûté une cinquantaine de millions de francs. Il coûtait, en plus, quarante-cinq morts.
(1) Offshore : à distance des côtes. On désigne ainsi les forages intéressant les zones submergées du plateau continental allant jusqu’à des profondeurs de 200 m.
CHAPITRE II
Dans le courant de la matinée. Alors qu'en mer la tempête atteignait son point culminant, une conférence se tint dans le bureau du capitaine Potier. Outre l’officier de gendarmerie, il y avait là le délégué de la société pétrolière, un nommé Béchard ; un membre du cabinet du sous-préfet de Bayonne, Escaudain ; son homologue de Dax, Gayon, et un ingénieurs naval dépêché par la circonscription maritime, Rambaud.
Tous, très affectés par l’événement, étaient fort embarrassés quant aux mesures qu'il convenait de prendre. A qui incombait-il de publier un premier communiqué ? Qui devait prévenir les familles ? Fallait-il, juridiquement parlant, considérer la plate-forme naufragée comme un navire ou comme une construction fixe ?
Béchard fournit quelques éclaircissements à cet égard et ajouta :
- Cela, ce sont des questions purement administratives... D’ores et déjà, vous pouvez être certains que la nouvelle s’est répandue comme une traînée de poudre. Les familles auront connaissance de l’accident avant la publication d’un communiqué officiel. A mon sens, il importe surtout que nous sachions à quoi est due cette catastrophe...
Rambaud, l’ingénieur, avança d’un air pincé :
- Il me semble qu’il ne faut pas chercher bien loin : un vice de construction de la tour, et des circonstances atmosphériques particulièrement défavorables, suffiraient à l’expliquer.
Béchard haussa les sourcils.
- Je regrette, je ne puis partager votre opinion, dit-il d’un ton incisif. La qualité mécanique de l’ouvrage est hors de question ; il a été réalisé par des techniciens de premier ordre et a subi, avant sa mise en service, les contrôles les plus sévères. A mon avis, il y a eu autre chose.